Et si notre première responsabilité était dans la détermination de nos valeurs ?

Cela fait un petit moment qu’écrire sur ce sujet me trotte dans la tête… Cela touche mon histoire personnelle mais, au-delà de ce sur quoi j’agis quotidiennement, cela concerne notre histoire à toutes et tous.

Et cela touche l’Histoire également ! Il y a un devoir de mémoire ici.

Je voudrais dans cet article contribuer à un changement de paradigme. Il me semble que le mot « responsabilité » est devenu comme un support de lourdeurs, de craintes, de stress. Pourtant c’est selon moi un mot soutenant la création et la vie !

Je crois profondément que mon métier, mon état d’esprit, de coach professionnel contribue à ne pas reproduire certaines erreurs du passé… Une goutte d’eau dans l’océan ? Oui, sans doute. Et les petits ruisseaux ne font-ils pas les grandes rivières ?

Être « responsable » c’est se porter garant de ses promesses voire de ses actes. Mais « Responsabilité » : « Réponse » & « abilité », c’est d’abord à mon sens « être capable de réponse ». C’est la capacité, et même, c’est le pouvoir de prendre soi-même des décisions !

Alors qu’en est-il dans notre vie quotidienne ?

« La majorité n’est pas la normalité »

Il est possible que cette phrase soit de Susan Sontag mais je n’ai trouvé qu’une seule référence sur le net (un commentaire sur un site) lui attribuant…

Toujours est-il que mon père m’a souvent dit cette phrase… car il est né en 1940 et a eu son enfance marquée par les absurdités de la guerre… à quoi peut mener de suivre une majorité sans remise en question.

La « normalité », au sens commun, c’est la « norme ». C’est ce qui est conforme aux conventions établies (inconsciemment souvent) par l’ensemble d’un groupe social, la « majorité ».

Cependant, suivre la norme, en voulant plaire aux autres, nous empêche d’exploiter notre savoir-faire et notre savoir-être qui nous rendent uniques. Il est préférable de cultiver un minimum de détachement intellectuel et émotionnel plutôt que de suivre la foule qui peut prendre une « mauvaise » direction.

La majorité n’est pas la normalité lorsque cette norme n’est plus au service de l’épanouissement, de la vie. La majorité n’est pas la normalité lorsque cette norme est au service de la peur.

N’est-ce pas sans vous rappeler quelque chose cristallisé depuis plus d’un an ?

 

L’Amtssprache

Lors de son procès pour crimes de guerres à Jérusalem, il fût demandé au nazi Adolf Eichmann :

– Était-ce difficile pour vous d’envoyer des dizaines de milliers de gens à la mort ?

– A vrai dire, c’était facile. Notre langage nous facilitait la tâche.

La personne qui l’interrogeait fût choquée par sa réponse et lui demanda :

– Quel langage ?

– Les autres officiers nazis et moi-même, nous appelions notre langage « l’Amtssprache ». C’est un langage par lequel on refuse la responsabilité de ses actes. Ainsi, si quelqu’un vous demande pourquoi vous avez agi comme vous l’avez fait, vous répondez : « Il le fallait. »

– Pourquoi le fallait-il ?

– Ce sont les ordres ! C’est la politique de notre société. C’est la loi…

Au sein de nos institutions, de nos entreprises, de nos écoles… Notre société Française sait-elle se protéger de l’Amtssprache ?

 

Le déni de responsabilité et la mort !

Un des plus grands conflits de l’humanité n’est pas du ressort, de la faute, d’un « grand méchant » comme Adolf Hitler. Non pas que sa responsabilité, justement, ne soit pas conséquente mais qu’en est-il de la responsabilité de la société ? Nous faisons tous, chacun et chacune d’entre nous, partie de la société dans laquelle nous vivons. Nous sommes ces petits ruisseaux. Des petits ruisseaux porteurs de parts de responsabilité commune.

L’expérience de Milgram à ce sujet est fascinante. 65% des personnes infligent des souffrances maximales (jusqu’à la mort) à une autre personne si on utilise un processus pour les convaincre qu’ils sont déchargés de toute responsabilité.

France Télévisions a, en 2010, organisé une émission « test ». Reprendre les bases de l’expérience de Milgram sous forme de jeu télévisé : « le jeu de la mort ». Y est donc ajouté l’appât du gain (les participants étaient toutefois prévenus que pour ce premier tournage test il n’y aurait pas de récompense) et y est ajouté l’influence du public. Un regard/jugement pour pousser encore davantage le participant (bien que prédomine les incitations de la présentatrice, la figure d’autorité)… Le taux monte alors à 81% !

 

Et moi ? Et vous ? Et nous ?

Serais-je capable de m’arrêter si j’étais pris dans un tel mouvement ? Je n’en sais rien au fond… Je crois que ma conscience augmente déjà la probabilité de ne pas « tomber dans le panneau ». Mais sous une autre forme, aurais-je les capacités d’être clairvoyant ? Je l’espère de tout cœur !

Une participante qui a pu s’arrêter avant de « tuer » dans l’émission (témoignage à 1h05min) explique qu’elle a eu l’image des camps de concentration… et cette dame évoque ses origines : un pays ex-communiste. Elle dit « Ce que vous me racontez là, le fait d’accepter l’autorité et… de se soumettre à un peu n’importe quoi, c’est pareil que les idéologies communistes, alors… Pourquoi on accepte ça ?! »

La conscience, qui peut passer par la mémoire, est fondamentale pour éviter ces dérives. Et je pense que cela passe aussi par une question essentielle : quelles sont nos valeurs ?

La prise de responsabilité et la vie !

Il nous reste toujours une responsabilité. Celle de notre vie et de notre place dans ce monde. Elle est acquise par notre naissance.

Il s’agit de passer du « je dois » à « je ne veux pas » et à « je veux ». Nos valeurs soutiennent nos « Je veux » et « Je ne veux pas ». Ce sont des références internes et non plus externes ; si tant est que nous soyons suffisamment détachés des jugements en interne.

Comme dit dans l’émission à propos des participants qui ont décidé d’arrêter le jeu avant la fin : « Tous vont justifier leur « rébellion » par un rappel à leurs valeurs profondes… »

Attention aux « valeurs en toc » !

Ce sont les « valeurs qui font bien », qu’il est de bon ton de « prôner ».

Quelles sont les valeurs associées à de « faux idéaux » ? C’est-à-dire ceux qui, au fond, ne vous correspondent pas mais qui vous permettent d’être reconnu et apprécié (cf. confusion entre « amour » et « reconnaissance »).

« L’exemplarité » par exemple peut être une formation réactionnelle (faire l’inverse de notre désir pour se conformer à ce qu’il « convient de faire »). On pourra associer : la propreté, la rigueur, la clarté, le travail, le confort, le bonheur, etc.

Il y a également les « idéaux fondamentaux » : respect de la vie, fidélité, vérité, beauté, amour, découverte, pudeur, justice, courage… Ces mots sont forts… mais font-ils vraiment partie de votre histoire ? Est-ce que votre vie, vos expériences, les incarnent réellement ? Qu’est-ce que votre vie quotidienne démontre à propos des mots que vous utilisez pour décrire vos valeurs ?

Sans se pencher sur cette question de nos valeurs profondes, qui relève donc de notre responsabilité, nous risquons de développer ainsi des liens avec des objets, des idéaux et des personnes en pensant que nous donnerons ainsi un sens à notre vie.

 

Alors quelles sont vos valeurs ?

En vous emparant entièrement de cette question… car elle est souvent prise à la légère. Combien de salariés croient « aux valeurs de l’entreprise » dans laquelle ils travaillent alors que le quotidien vécu dans les murs n’est pas en cohérence ?

Quelles sont vos valeurs profondes ? Quelles sont les besoins essentiels dans votre vie, que vous aimez vivre le plus possible ? Autrement dit, qu’est-ce qui donne du sens à votre vie et l’articule ?

C’est ce qui fera que vous saurez que vous êtes sur votre chemin et non celui des autres. C’est ce qui vous aidera également à vous libérer du jugement. Le jugement des figures d’autorité de l’enfance toujours présentes en nous, et celui des regards extérieurs.

 

Notre responsabilité

Parents, enseignants, responsables de projets, responsables d’équipes, dirigeants… Quand vous emploierez les mots « Il est obligatoire », « Il faut », « Tu/je dois », « Vous devez », « Faîtes-le ! », « Tu/je devrais », « C’est la règle », « Il est interdit »… s’il vous plaît, observez ces mots, la violence qu’ils transportent.

Je vous invite à ce changement de paradigme : peut-être que notre première responsabilité est déjà de ne pas voler la responsabilité des autres…

Alors le mot « responsabilité » résonnera peut-être moins avec « punition » pour chaque enfant éternellement présent en nous. Sortir de la peur.

Le mot « responsabilité » pourra résonner comme « prendre sa juste place », pas celle d’un autre. A votre service d’abord, au service des autres, au service de votre entreprise, au service des élans.

« Soyez-vous-même, les autres sont déjà pris. »

(Oscar Wilde)

 

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